Un jour, nous considèrerons peut-être la pandémie comme une répétition générale, en regard de ce que l’avenir nous aura réservé. Après un an et demi, chacun peut tirer quelques enseignements, en particulier sur sa propre gestion de l’information. Quand l’inquiétude et la confusion reviendront, qui écouter, qui croire ?
Il se passe rarement aussi peu de temps entre les prédictions et leur éclatement au contact de la réalité. Prenons donc un moment pour nous souvenir de toutes ces voix tonitruantes qui se sont élevées, chacune avec sa vérité, sa conviction, son émotion. Mégalomanes, profiteurs ou simples grandes gueules, on leur a trop accordé notre attention et notre crédulité.
- Les futurologues qui, dès le 16 mars 2020, savaient nous dépeindre le « monde d’après » – en général une projection de leurs désirs ou de leurs craintes ;
- Les marchands de rêve qui avaient, on ne saura jamais comment, trouvé LA solution, le traitement miracle ;
- Les prophètes du déni, capables d’affirmer sans ciller devant une caméra que tout ça n’était pas plus grave qu’une grippe ;
- Ceux qui clamaient leur colère ou leur angoisse sur les réseaux sociaux, et accusaient sans preuves les boucs émissaires du moment.
Quand on arrive en pays étranger, on conseille souvent de ne pas se fier à ceux qui viennent vers vous en clamant « Taxi! ». Ces braves gens veulent juste vous intercepter et vous embarquer dans leur voiture de maraude aux tarifs « maison », avant que vous ne trouviez les vrais taxis, qui attendent plus loin en file. Le même conseil pourrait s’appliquer à l’information et aux opinions ; ceux qui tiennent le plus à les partager n’ont pas forcément les meilleures intentions.
Souvenons-nous aussi de ces idées bien arrêtées que nous avons parfois adoptées dans les premiers temps de la pandémie, fondées sur un ressenti ou un message qui semblait convaincant.
Tant d’affirmations, et si peu d’informations.
Dans 1, 5 ou 20 ans, une autre crise viendra sans doute, aussi dure ou pire. J’aimerais croire que nous aurons appris, au moins un peu, à ne pas écouter les charlatans, ceux qui propagent leur propre aveuglement, ou qui cherchent juste à nourrir leur ego. À moins écouter la voix de nos propres inquiétudes, aussi.
Mais pour cela, il faudra déjà surmonter notre besoin de convictions, dans des situations qui seront définies par l’incertitude.